T'es un nobody qui choisit de faire de la place dans son horaire de la fin de semaine pour passer du temps avec d'autres nobodys de presque tous les âges qui évoluent dans presque toutes les sphères de la société: comptable, travailleur d'usine, scientifique, futur policier, conseiller en ressource humaines, vendeur d'assurances, etc. Ce qui réunit ce groupe aussi disparate, c'est la passion pour une activité -un sport d'équipe- que tous ont probablement commencé à pratiquer quand ils étaient enfants.
On pourrait même dire qu'à quelque part, pratiquer ce sport d'équipe -celui-là ou un autre, peu importe- c'est se créer une petite bulle d'enfance dans notre vie d'adulte: on oublie pour un temps les REER, le rapport d'impôt, le collègue de travail chiant, la pinte de lait à aller chercher à l'épicerie, le rendez-vous au garage, le lavage à faire, et autres tracas de la vie quotidienne, et on JOUE.
Je ne sais pas pour toi, mais moi c'est à peu près les seul moments pendant lesquels je suis concentré à 100% sur le «ici» et le «maintenant». Prends M, par exemple. Il est capable d'accélérer beaucoup plus rapidement que le reste d'entre nous. Il faut donc s'en méfier, car il peut nous contourner facilement lorsqu'il s'y met. Le meilleur moyen de le neutraliser, c'est d'essayer de faire en sorte qu'il ne puisse pas avoir possession de la balle, en se plaçant dans la ligne de passe pour empêcher qu'un coéquipier puisse la lui envoyer (dans ce cas, il faut régulièrement regarder derrière soi, car M est un joueur intelligent qui, lorsqu'il constate qu'il est couvert, se déplace rapidement et silencieusement de façon à créer une nouvelle ligne de passe) ou en prévoyant le jeu de façon à être en position de poker la balle avant qu'il ne réussisse à la récupérer. S'il court vers nous avec la balle en sa possession et s'apprête à essayer de nous déjouer, un bâton tenu d'une main avec la palette au sol devant soi maximise les chances de l'arrêter en pokant la balle. Il y aussi P, qui court peu mais a un tir puissant et précis, et est un véritable mur en défensive qui arrête à peu près tout ce qui passe à moins de 2 mètres autour de lui. Quand on joue contre lui, il ne sert à rien d'essayer de faire une passe de son côté de terrain. Mieux vaut se servir de sa rapidité (quand on en a) pour le contourner à distance ou changer de côté de terrain pour faire face à l'autre défenseur. Et je pourrais continuer longtemps avec A, très rapide et qui a de si bonnes mains qu'elles semblent parfois aller plus vite que son cerveau et qu'il se déjoue lui-même avec ses feintes, F, joueur lent qui a un tir très précis et est un bon pokeur, etc. Bref, j'ai un fichier mental sur chacun des joueurs, et je consulte constamment ces fichier pendant le déroulement du jeu. Penser à tout ça, en plus d'essayer de prévoir le jeu que l'équipe adverse s'apprête à essayer de faire, ou de tenter de construire soi-même un jeu, permet de donner du repos au hamster qui court normalement tout le temps dans la roue située dans notre tête. J'aime croire que c'est bon pour la santé mentale.
Il n'y a pas de prix ou de trophées remis au gagnants, pas plus qu'il n'y a d'équipes fixes. Le hasard nous fait jouer avec et contre tout le monde à un moment ou l'autre. Bref, nous jouons pour le fun et pour garder la forme, même si c'est toujours plaisant de gagner et un peu plate de perdre.
J'ai donc beaucoup de difficulté à voir ce que ton «je reviendrai p'us icitte, je peux pas jouer avec du monde qui jouent comme ça!» et ton chiâlage contre tes coéquipiers quand tu perds peuvent apporter dans ce contexte. C'est ça, reste donc chez vous avec ton mémérage de cour d'école du primaire, au lieu de gâcher l'ambiance pour tout le monde! C'est pas parce qu'on retombe un peu en enfance en jouant qu'on doit oublier tout ce qu'on a appris depuis l'âge de 12 ans.
Mais non, tu as mentionné après le match que tu reviendrais la semaine prochaine et les semaines suivantes, même si tu ne sembles pas t'amuser beaucoup avec nous. Est-tu masochiste, ou es-tu simplement un agrès?
(Mal)Heureusement, la diplomatie nous empêche parfois de dire les choses.
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